Une saison en cabine
- François Jeanfils

- il y a 1 jour
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Au fil de cet article, je vous propose d’embarquer sur mon bateau-cabine et de vous faire vivre, sous forme de récit chronologique, mes aventures de 2023. Avez-vous noué vos gilets de sauvetage ? C’est parti, les amarres sont lâchées.

25 février
Les épouses préfèrent voir leur mari à la maison, occupé à la construction du nid familial. Ruminer leurs absences halieutiques, souvent teintées de mystères et de soupçons, les rend moins rayonnantes. Les bons maris en ont conscience : ils s’efforcent de les rassurer.
Moi, j’ai trouvé le truc qui sauve : j’ai d’emblée avoué entretenir une armée de maîtresses. Elles me font rêver, je découche très souvent pour elles. À cette annonce, le monde s’est écroulé sous ses pieds : elle s’imaginait déjà que j’allais la quitter pour papillonner au gré du vent.
Mais non, rassure-toi, c’est toi que j’aime ; mes maîtresses ne sont que des carpes, des passades. Rassurée par cette confidence somme toute bien innocente, j’ai reçu la permission de pêcher autant que je veux : une semaine sur deux, ou une semaine sur trois, durant la bonne saison. En hiver, je couvre de paille le nid. Le parfait équilibre conjugal.
Ainsi, dès la fin avril, après une période d’hivernage, mon cerveau bascule en mode carpe. C’est limite pathologique, mais à mon âge, on ne se refait pas : j’assume. Surtout que j’aime ça, la pêche.
J’ai simplement appris à ne plus parler carpe à mon entourage, pour ne plus devenir la cible des moqueries. Ça passe beaucoup mieux maintenant : le silence est souvent la meilleure arme défensive. Il fut une période où je tapissais le mur de mon bureau de photos de carpes chéries dans mes bras. J’étais la risée du service ; il m’a fallu du temps pour m’en rendre compte.
Aujourd’hui, je les affiche dans ma buanderie, où personne ne passe… à part mon chat. Mais je devine parfois, au tressaillement de ses moustaches, que lui aussi me prend pour un cinglé. Au mieux un original, un peu tordu quand même, j’avoue.

17 mars
Quelle belle sensation de voir les premières primevères envahir la pelouse du jardin. Leurs pétales éclatants projettent des éclairs de couleur qui réveillent des neurones bien particuliers.
À cette même période, j’ai pris l’habitude de m’abreuver de sève de bouleau fraîche. Un simple tuyau introduit dans le cambium de l’arbre, relié à une bouteille, et il en sort une vraie potion magique, meilleure que celle de Panoramix. Mon vague à l’âme hivernal disparaît, mes articulations rajeunissent par enchantement et mon esprit s’envole vers des lacs et rivières remplis de babars bien gras. Que ça fait du bien au moral !

En mars, il est encore trop tôt pour profiter pleinement de longues sessions en cambrousse. C’est tout bénéfice pour les pêches éclairs de jour à proximité de mon domicile, en Belgique. J’aime m’asseoir près d’un feu de bois en ce début de printemps, un roman de Foenkinos entre les mains. J’adore cet auteur ; son dernier roman, Numéro deux, n’est pas le plus vibrant, mais je vous le conseille quand même.
Du moins à ceux d’entre vous qui ne sont pas lobotomisés par Face de Bouc et savent encore apprécier une écriture riche en vocabulaire, en style, en poésie, et sans faute d’orthographe.
Me voilà donc niché dans les recoins secrets d’une pièce d’eau interdite d’accès au public. Je retrouve avec plaisir de vieilles connaissances.Voilà Martine : super, tu as pris 1 kg, toi, mais tu es toujours aussi jolie. Retourne à l’eau et va dire à Murielle que je suis de retour ; je l’aime bien, celle-là, avec ses formes généreuses.Mais non, c’est Grosse Écaille qui a envoyé Foenkinos dans les fourrés : la plus grosse de la carrière, 18,4 kg.
Ainsi passe le prologue de ma saison : un échauffement de mes blanks, un dérouillage de mes moulins, mais surtout l’amorce d’une excitation qui ne pourra vraiment s’exprimer que lorsque je voguerai sur mon bateau-cabine. Très, très prochainement. Patience.
03 avril
Vivement la remontée des températures et la diminution de la pluviométrie, car en ce moment, mes rivières sauvages préférées débitent encore trop fort.
J’aime pêcher en cabine les têtes de bassin : elles sont peu naviguées, sauvages, inaccessibles du bord et sans carpistes — une race un peu bizarre dont mon cerveau reptilien a appris à se méfier. Mais ces rivières grondent trop souvent : la moindre pluie intense est dévastatrice tant les débits sont réactifs. C’est le cas pour l’instant.

Je vais donc encore patienter et mettre ce temps libre à profit pour faire réviser mes moteurs thermiques, passer ma remorque au contrôle technique, recharger mes batteries lithium, commander des sacs de tiger-nuts et m’assurer que toute cette logistique ne me fasse pas défaut au coup de feu du départ.
Sur ma messagerie, ça commence à grenouiller : mes moussaillons attitrés triturent leur agenda et activent mes notifications. Où, quand et avec qui vais-je partir ?Ce sera avec Paolo, sur le Lot, pour 10 jours. Un ami qui ne me quitte plus depuis notre première rencontre sur le lac de Bin El Ouidane en 2013.Un carpiste hyper pointilleux et cérébral dans sa pêche : tout doit être réfléchi, analysé, maîtrisé. Tout le contraire de mon mode de fonctionnement. Je crois davantage au lâcher-prise, à la providence, à la générosité de l’univers.
Bizarrement, ça colle entre nous, et c’est l’essentiel : une complémentarité riche au final. Et puis, c’est toujours lui qui veut cuisiner et faire la vaisselle à bord. Un bon point pour lui.
19 avril
Enfin, le jour de la libération de Furtif, mon cabinier deux places. Il trépignait sous son hangar ; je le sens heureux. Et je le suis tout autant de retrouver Paolo.
Les premiers 300 kilomètres jusque Paris sont comblés par une conversation ininterrompue. Deux carpistes ensemble, c’est comme deux gonzesses en mission boutique : ça cause sans arrêt.La traversée de Paris coupe court aux gambades verbales : il faut se concentrer, je n’ai aucune envie de ruiner ma session à cause d’un accrochage routier avec ma longue remorque.
Terminé le temps où j’appuyais sur la pédale pour grappiller du temps de pêche. Nous roulons pépère, en nous relayant au volant, jusqu’en fin d’après-midi, pour nous arrêter à notre première étape : un endroit charmant, en pleine nature.Un des avantages du bateau-cabine, c’est qu’il peut se métamorphoser en camping-car en un clin d’œil.

20 avril
En fin de matinée, Furtif glisse enfin de sa remorque et fend le Lot. Son cœur de 30 ch vrombit au quart de tour, les remous de la rivière lui font esquisser un petit pas de danse : il est aux anges.
Pendant que Paolo prépare le bateau au combat, je prends plaisir à revoir mes connaissances locales, qui acceptent de sécuriser la camionnette et la remorque. Ils ont quand même un accent savoureux, ces Français du Sud ! Vacances !Déjà, je ne pense plus à la Belgique : mes petits soucis n’ont pas franchi la frontière. Je savoure tout, même avant la pesée d’un premier babar. Le sourire de la boulangère juste avant d’embarquer, j’adore.
Prêts à pêcher en début d’après-midi, nous nous ancrons à proximité de la cale de mise à l’eau. Je connais déjà de nombreux hot spots : je pêche souvent le Lot. Nous nous positionnons sur un linéaire qui, à première vue, semble quelconque, mais que nous savons garni, sur près de 200 mètres, d’un amoncellement inextricable d’arbres morts coulés. Un hôtel de luxe abritant nos chéries.
Des carpes inaccessibles du bord, quasi jamais pêchées, et par conséquent pas farouches du tout. Elles répondent immédiatement à l’arrosage de noix tigrées et de bouillettes.Notre première bataille sera victorieuse : 7 carpes de 13 à 17 kg. Pour une première après l’hiver, c’est un petit nirvana. Quel bonheur !

21 avril
Paolo voulait insister sur ce poste et y stationner une journée de plus. Moi, pas. Pourquoi se priver de la pièce maîtresse du bateau-cabine, son atout le plus merveilleux pour prendre du fish : la mobilité !
Les premières 24 heures sur un spot sont toujours les plus fructueuses. Ensuite, la courbe du rendement plonge. Alors pourquoi ne pas exploiter cette loi naturelle en changeant de spot chaque jour ? C’est tellement facile avec un bateau-cabine.
Nous convenons ensemble de quitter les lieux, non sans les arroser copieusement : nous y reviendrons dans quelques jours. Nous levons les ancres et vogue Furtif vers d’autres spots. Cette fois, nous décidons de ne pas descendre vers Luzech. Cap au contraire sur Larnagol, en amont. Je vais une fois de plus m’émerveiller devant les falaises de Bouziès, le merveilleux village perché de Saint-Cirq-Lapopie, et toutes ces autres beautés qui orchestrent le décor du Lot.

Si des responsables halieutiques du Lot lisent ces lignes, qu’ils sachent que je les remercie de leur clairvoyance : la pêche de nuit y est autorisée sur tout le parcours. Je suis Belge : chez nous, la pêche de nuit est autorisée partout depuis 2007, sans problème particulier. J’ai encore beaucoup de mal à composer avec les secteurs français où la pêche nocturne est interdite et truffés de gardes informés par les locaux via Face de Bouc, merveilleux outil de délation.
J’ai ma petite idée sur les raisons d’une telle législation moyenâgeuse. Si Christophe Courtois me le demande, je pourrais développer tout cela dans un papier spécifique. Polémiques assurées ! En Belgique, nous avons connu les mêmes débats. La raison, portée par le combat acharné de quelques-uns, a fini par l’emporter.Aujourd’hui, les jeunes carpistes belges n’imaginent même pas que la pêche de nuit ait pu être interdite. C’est comme si on leur disait qu’avant 2007 on ne pouvait pas promener son chien ou faire du jogging la nuit.

28 avril
La session se termine. Le cabinier boude jusqu’à la mise à l’eau de Bouziès. Ces 9 jours ont gorgé mon smartphone de nouvelles photos et vidéos : pas seulement du mucus, heureusement, mais aussi des clichés d’ambiance, de beaux paysages captés par mon drone, des scènes de vie à bord.
Tout ce qui fait le bonheur de la pêche de la carpe. Les plus beaux fichiers sont déposés sur mon compte privé Instagram : partager à distance mon bonheur avec mes proches fait partie intégrante de ma pêche. J’apprécie aussi d’échanger avec d’autres passionnés.
Les profils qui ne me plaisent pas, en gros les curieux, les sponsorisés formatés par leur marque, et les pêcheurs de bordels privés, valsent directement à la poubelle. Chacun ses affinités.
Sur le chemin du retour, j’éprouve toujours une légère sensation de deuil. Mais ce sentiment est vite balayé par mes pensées, qui s’envolent déjà vers la prochaine session.Mes rivières sauvages, la Seine et la Marne, tirent encore trop fort. Je me ferais bien une petite session à Madine : j’ai envie d’écouter les chevreuils aboyer la nuit, ils me manquent.
Ou alors le barrage du Chastang sur la Dordogne : au printemps, ce ne sont que cris d’amour des animaux et chorales divines d’oiseaux. La Corrèze… aucun bruit de voiture, et les battements d’ailes d’un rapace survolant Furtif sont presque audibles. Cette région me manque aussi.
Je me botte aussi le cul : chaque année, je m’oblige à découvrir une nouvelle eau. Cette fois, ce sera la Moselle. C’est déjà calé avec mon ami Bastien, un jeune carpiste nantais passionné. Il me faudra d’abord trouver une mise à l’eau adéquate et un endroit sûr pour la camionnette et la remorque. J’organiserai cela lors de vacances familiales en juillet, du côté de Toul.

09 mai
Mon dévolu se pose sur Madine pour plusieurs raisons. Je n’ai que 5 jours devant moi : je dois limiter les kilomètres. Et ce printemps pluvieux rend mes petits paradis de rivière impraticables en cabine. Et puis Madine, c’est Madine : son nom seul est un argument massue. Un gros bijou très bien géré par ses responsables.
Néanmoins, la garderie y est impitoyable. Toutes mes connaissances s’y sont fait aligner dans le carnet noir. Les gardes tournent tous les jours, et surtout aux heures les plus critiques pour un carpiste.Conséquence : il faut pêcher uniquement de jour et respecter le règlement à la virgule près (mouillage, repères, zones autorisées…).
Départ après le boulot. Une nuit dans mon bateau-cabine-camping-car, à côté du lac, au pied du monument de Montsec, entouré des fantômes de milliers de soldats tombés. Je m’endors au son d’un rossignol esseulé, posé sur les branches basses d’un chêne proche.

10 mai
Pas de temps à perdre : je dois être pêchant le plus tôt possible sur un spot que je connais par cœur pour profiter des meilleures heures matinales.C’est dans ces circonstances que l’on voit l’expérience du pêcheur : chaque geste est rationnel, rapide, efficace. Un drill, comme pour les meilleurs combattants au front.
Mes lignes sont tendues. Ce n’est qu’alors que je savoure un bon café, toujours meilleur qu’à la maison. J’observe aux jumelles un collègue ancré plus loin, qui me fait de grands signes.Dans la journée, je vais le saluer : il avait reconnu mon bateau. C’est un Allemand ; il me suit sur Instagram, et c’est avec plaisir que je m’ouvre à son compte. Depuis, nous échangeons régulièrement en anglais sur nos sessions respectives.

12 mai
Deux jours que je capote. Hier pourtant, un réel espoir de prise m’habitait : deux carpes s’étaient manifestées, un saut et la vision furtive d’un sous-marin lors d’une dépose.J’ai seulement eu droit à la visite de la garderie et aux rappels secs des éternels avertissements. Pas très sexy, mais ça fait partie de la pêche.
Aujourd’hui est un autre jour, et tout peut encore se produire. Isolé sur mon petit “Boum” du nom de Furtif Junior, je me sens bien.Loin de tout, un Eric-Emmanuel Schmitt (Le Défi de Jérusalem) entre les pinces, bercé par le tango des petites vagues, je goûte chaque instant. Quand une belle lumière apparaît dans le ciel, j’adore capturer quelques clichés pour nourrir mon compte Instagram. En hiver, coincé à côté de mon poêle à bois, ces images me font revivre les émotions.
Les cygnes s’approchent ; ils ont l’air de me demander si ça mord. Je leur donne quelques quignons de pain. En fait, non, ils ne demandent pas : ils me parlent. Je suis dans une autre dimension. Ils me disent de patienter encore un peu : ils savent ce qui se trame sous leurs pattes palmées.
14 mai
Quatre jours de pêche gravent trois carpes dans le carnet : 24,4 ; 17 et 14,4 kg. Madine m’a encore comblé de bonheur. La session se termine comme elle a commencé : sous une pluie presque continue. J’ose à peine regarder Vigicrue, je sais que je devrai encore repousser ma prochaine session en rivière.
On verra bien. En attendant, je récupère ma camionnette et ma remorque, cachées chez un particulier, j’arrache Furtif Junior au lac malgré ses protestations, et je rentre en Belgique, fatigué mais heureux.Une fatigue savoureuse, sans rapport avec celle provoquée par un stress récurrent.

1er juin
Ah, le mois de juin ! C’est mon préféré : le mois des pêches assurées, des longues journées baignées de douce chaleur et des concerts d’oiseaux.Mon entourage le sait : en mai-juin, je suis seul maître de mon agenda. C’est pêche, pêche et encore pêche. Ne venez pas me coller un rendez-vous chez le dentiste ou un refus de congé, j’en ferais un ulcère à l’estomac.
En ce moment, je suis de retour sur le Lot avec Paolo, encore dans sa partie navigable amont entre Saint-Géry et Larnagol. Les conditions de pêche sont limites : le Lot est nerveux, agité par de nombreuses pluies.Ce n’est pas que les carpes ne mordent pas ; le problème, c’est la tenue de ligne dans le courant vif.
Ma méthode semble barbare, mais elle est efficace, et après réflexion, c’est la seule vraiment applicable. Je leste la ligne avec une grosse pierre, parfois de plus de 500 g, et je tends très fort la bannière.Mes cannes sont solidement fixées verticalement dans un tube en inox. Frein fermé si je suis près d’un obstacle ; frein juste serré à une tension légèrement supérieure à celle exercée par le courant si je suis en terrain dégagé (rare en rivière).
Il y a aussi la méthode du téléphérique, qui sauve parfois la dépose, à condition de choisir un endroit relativement propre : elle laisse quelques mètres de mou dans la bannière, largement de quoi permettre à la captive de se tanquer dans les arbres morts proches.

6 juin
Chaque spot, depuis le début de la session, nous a gratifiés de belles courbures. Avec les cannes verticales, le mot “départ” n’a plus vraiment sa place. Les carpes se sont toutes manifestées en journée, ce qui n’est pas pour me déplaire. Dormir la nuit fait partie des paramètres qui allongent l’espérance de vie… et réduisent les maux de tête.
Ce matin, alors que Paolo dormait encore et que mon nez tournoyait dans les effluves d’un robusta, mon esprit s’est encore envolé dans les nimbes des énergies de la vie. Il composait avec les chants d’oiseaux, l’odeur envoûtante de la rivière et, qui sait, avec quelques esprits rodant sur l’écume.
Je n’aurais pas aimé être un pêcheur aux leurres constamment en action à la recherche de gros brochets ou de silures. J’aime trop me plonger dans la contemplation : seule la pêche de la carpe le permet à ce point.
Bang ! Bip, bip, bip… Kling, kleng, klong. Le bruit de la canne qui se bloque dans le tube, la plainte des avertisseurs, puis le son de guitare de la bannière tendue. J’adore ce concert digne du plus bel opéra.
Redressé à la vitesse de l’éclair — tant pis pour le café renversé — la canne se courbe de toute sa puissance dans une danse folle. Ces instants sont captivants.Un neurologue parlerait de décharge hormonale mêlant adrénaline, dopamine, sérotonine, endorphines… Moi, je préfère y voir un beau cadeau du ciel.
Entre alors en jeu la complémentarité millimétrée des deux pêcheurs. Pendant que je saisis la canne, Paolo, réveillé brutalement, saute dans le zod et prend la place du barreur. Je monte ensuite à bord : le combat commence.
Toutes les manœuvres ne visent qu’un but : se rapprocher de la furieuse sans qu’elle ne se colle dans un obstacle. Et zut, elle se tanquera quand même : un arbre coulé que nous n’avions pas repéré à l’échosondeur vient briser le rêve.
Mais ce matin, les esprits étaient avec nous : elle finira tout de même dans l’épuisette, 16,9 kg au peson.S’ensuit une belle séance photo au lever du soleil, baignée d’une lumière orangée qui annonce une journée merveilleuse. Une de plus !

22 juin
C’est avec beaucoup de satisfaction que j’ai observé les données de Vigicrue ces 15 derniers jours : une courbe plongeant enfin vers des débits acceptables.
Paki, mon petit Spectrum blanc doté d’un 30 ch, peut enfin sortir de sa torpeur. C’est le bateau que j’utilise quand je ne trouve pas de compagnon : une seule place à bord. Plus rapide, plus puissant, plus léger, plus maniable que mon Furtif deux places de 5 mètres.
Mise à l’eau à Port-Mort sur la Seine. Je remonte le courant jusqu’au barrage de Beaulieu, tout un secteur très peu pêché, et pas du tout dans sa partie amont tant il est sauvage, impêchable du bord et inaccessible aux cabiniers sans gros moteur.Ce secteur permet aussi d’accéder à l’aval, sur la Seine navigable et ses vieilles ballastières sauvages. Le passage des écluses ne pose guère de problème, pour peu que l’on soit en règle avec la législation nautique et la taxe VNF, que les éclusiers vérifient toujours.
Au début, je craignais de côtoyer les énormes pousseurs dans les écluses, mais en réalité, ça ne pose aucun souci.

24 juin
Après la mise à l’eau d’avant-hier, j’ai remonté la rivière jusqu’à son cul-de-sac à Beaulieu. Plusieurs tables de mets savoureux ont été dressées en chemin : ici devant un énorme arbre tombé dans la rivière ; là, dans un joli méandre bordé de frondaisons envahissantes ; là encore, à l’entrée d’un chenal menant à une gravière.
Mon premier spot de pêche n’avait évidemment pas été amorcé à l’avance, mais je savais que mes appâts tombaient devant des groins affamés. J’avais repéré cette zone l’année précédente, y extrayant trois babars de 19,8 ; 20,1 et 20,6 kg, sans compter quelques 12–16 kg.C’est mon meilleur coup de ligne en Seine, impossible de l’oublier. J’étais très excité de revenir.
Mais un jour n’est pas l’autre. Je le savais… tout en nourrissant, avec une petite dose de mauvaise foi, l’espoir de rejouer le même film. Au final, une seule carpe se manifestera, mais pas un pin’s : 20 kg tout rond. Et, après comparaison des photos, c’était l’une de celles déjà montées à bord l’année passée.
J’ai eu droit à d’autres émotions dont je me serais bien passé : une chiée de silures. Certains, trop gros, arrachaient les lignes dans leur dévalaison folle avec le courant. Je n’aime pas ces bestioles. Quand un invité partage ma pêche, je lui refile directement la canne : il prend son pied, moi pas.Sauf pour la joie de l’ami qui adore ces combats dantesques avec les “chats”.

25 juin
Cette sortie est encore une réussite. En cabine, le rendement est largement supérieur à celui de la pêche du bord. Je n’ai connu qu’un seul spot capot.En 5 jours, je bouscule une belle miroir de 20 kg et 7 communes entre 8 et 14 kg. Je ne compte pas les chats…
Dans ce paragraphe, je voudrais surtout souligner une rencontre. Lors du retrait du bateau de la Seine, je suis abordé par un carpiste local. Au premier abord, je me méfie : je devine souvent, derrière ces approches, une jalousie latente envers “l’étranger qui pêche en cabine mes carpes sur mes spots et va rameuter toute la Belgique”.
Je connais ces schémas de pensée noire par cœur et les dérives nauséabondes qui mènent parfois à des campagnes haineuses sur les réseaux.
Mais non : ce pêcheur m’a finalement inspiré confiance. Il y a toujours une sorte de rayonnement dans les yeux des gens bienveillants. Je regrette de n’avoir pas retenu son nom. Il fait partie d’une association carpiste locale qui organise chaque année un enduro dans le secteur. Le but est de promouvoir la pêche de la carpe et, avec les bénéfices, de rempoissonner la Seine en carpes. Bravo !Il y a 20 ans, je m’étais engagé comme lui pour la cause carpiste en Belgique. Je sais combien cela demande d’abnégation.

7 juillet
Je ne comprendrai jamais le carpiste qui pêche pépère, toujours le même secteur, les mêmes carpes. Le vrai passionné lâche les amarres et vogue vers de nouveaux horizons, vers d’autres difficultés, et donc d’autres mérites.
Cette fois, c’est la Marne qui accueille Paki et son capitaine. Mes amis habituels sont pris par leurs soucis, leur boulot, leur femme exigeante… Je serai encore seul, mais ça ne dérange nullement le vieux rat que je suis. Je dois simplement faire preuve de la plus grande prudence : la pêche en cabine est très dangereuse, et je ne pourrai pas compter sur l’aide salutaire d’un moussaillon en cas de coup dur.
La Marne, dans le secteur d’Épernay, est proche de chez moi, et je peux abriter mes véhicules à proximité immédiate d’une mise à l’eau dans un camping clôturé et sécurisé par caméras.Que demander de mieux pour une logistique rapide ? Je peux être pêchant dans les cinq heures qui suivent mon départ de la maison.

08 juillet
Je regrette d’avoir collé un rendez-vous professionnel important lundi prochain. Impossible de prolonger ma feuille de congés d’un jour ou deux. Demain, je devrai déjà replier.
Les courbures sont de véritables ventouses psychologiques : j’ai beaucoup de mal à m’en décoller. Tous mes spots explosent mes blanks. On est loin des pièces d’eau surpêchées où le carpiste disserte à l’infini sur les montages performants ou la stratégie ALT d’éducation autour d’une bouillette très spéciale.
Durant cette session, il suffit d’amorcer la veille, avec quelques louches de n’importe quoi, et le lendemain, c’est toujours courbure assurée. Par habitude, j’amorce avec des tiger-nuts, du maïs et des boules.J’en viens à me demander si je ne ferais pas des économies en bennant du crottin de cheval. Mon propos est surligné, j’en conviens, mais je suis plus proche de la vérité que ceux qui affirment qu’il faut des billes ultra élaborées pour tirer du babar en rivière.
Ah oui, j’allais oublier : sur la Marne, la pêche de nuit est autorisée partout. Cool. Merci aux responsables halieutiques de cette fédération : l’intelligence finit toujours par l’emporter.Un peu plus au sud, sur la Seine, la chasse nocturne du carpiste est, elle, autorisée… Et rien de plus zélé qu’un chasseur de carpistes nourri par la délation sur Face de Bouc.

22 juillet
Je suis en pleine action de pêche. Sans bateau, sans cannes, sans aucun matos. Juste un vélo. Un tour de magie ? Non : la pêche, c’est aussi la prospection. Elle ne se résume pas au babar dans les bras.
Mon camping-car est garé avec mes proches dans un camping collé à la Moselle. Je ne connais pas cette rivière, elle sera ma découverte de l’année. Mais avant d’y déposer mes montages, j’ai besoin de la sentir, d’entrer en connexion avec son esprit. Plus prosaïquement : je dois vérifier les mises à l’eau et trouver un particulier pour sécuriser camionnette et remorque.
Liverdun–Flavigny-sur-Moselle en deux jours de promenade à vélo, mollet vigoureux et yeux bien ouverts. Les oreilles aussi : je rencontre par hasard un carpiste local qui se lance dans un monologue :
« La Moselle est vide de ses babars, ils ont tous été volés par des étrangers pour leurs pêcheries. La pêche de nuit est interdite sur de nombreux secteurs, les gardes fédéraux tournent la nuit pour casser les carpistes, les Roumains pêchent au filet et bouffent tout, les véhicules sont incendiés aux rampes de mise à l’eau, les cabiniers pêchent sur les places amorcées par les locaux, alors quand j’en vois un, je préviens les fédéraux, j’ai un pote chez eux. »
Oui, d’accord, merci pour ces précieuses informations…
Traduction : “Le Belge, reste chez toi, la Moselle c’est pour moi tout seul.”Morale de l’histoire : ne faire confiance qu’à ses propres observations. Le monde carpiste est, en général, trop recroquevillé sur lui-même pour faire preuve de générosité.C’est d’ailleurs l’une des raisons pour lesquelles il n’y a pas encore de pêche de nuit généralisée en France.
L’essentiel est réalisé : j’ai repéré les mises à l’eau, les lieux possibles de protection des véhicules, et j’ai déjà une idée assez précise d’où je pêcherai. Des coins qui sentent fort la carpe.Un repérage réel vaut mieux qu’un tour sur Google Maps. J’envoie mon rapport de prospection à Bastien, mon futur coéquipier. Il me répond avec un immense soupir d’impatience. Notre session est prévue pour la mi-août.

27 juillet
Me revoilà pour 5 jours de pêche sur la Seine. Une rivière, mais en pratique je suis en eaux closes : j’exploite les ballastières et vieux bras de Seine contigus à la rivière.
Je reviens sur celle que j’avais déjà pêchée régulièrement il y a 25 ans avec Alain. À l’époque, c’était une expédition périlleuse pour y accéder en zodiac. Il fallait débroussailler nos emplacements de bivvy : c’était la forêt vierge.Avec mon cabinier, aujourd’hui, c’est un jeu d’enfant de l’exploiter sur différentes zones et de voguer d’une gravière sauvage à l’autre en quelques instants.
Cette gravière, inaccessible au public avec un véhicule, offre un environnement atypique. Elle est minée par des dizaines de péniches abandonnées, rouillées, dont certaines ont définitivement coulé et se sont muées en palais à carpes. La pêche y est relativement difficile, tant les herbiers sont omniprésents. Les longs repérages en zodiac révèlent précisément les zones pêchables, d’abord devinées grâce au survol de mon drone.
Les tâches dans les herbiers, les abords de péniches : tout est exploité. Mon bateau, caché dans l’ombre de ses confrères géants, est invisible. Les rares embarcations de pêcheurs de carnassiers passent sans m’apercevoir.Si une crise cardiaque devait m’emporter, on retrouverait mon squelette, paisible et bienheureux.
Les articles halieutiques adorent vous abreuver de détails techniques de montages, de stratégies d’amorçage, de recettes de bouillettes… Je vous en fais grâce. Cela m’ennuie.Le pire étant les publicités déguisées des rédacteurs sponsorisés. Concilier passion et rentabilité, c’est souvent détruire l’une au profit de l’autre.
Vous ne saurez donc pas avec quel hameçon j’ai eu la joie d’extraire, durant cette session, une magnifique fully de 12 kg, bien dodue, à l’écaillage éblouissant. Je ne vous transmets que mon contentement, rehaussé par la prise de quelques autres poissons plus communs.

12 août
Quand une nouvelle session m’appelle, je n’ai que l’embarras du choix tant je connais de plans d’eau différents. Je pourrais me reposer sur mes lauriers et retourner sans effort vers ces rêves déjà vécus.Mais non : une obsession de quête jamais atteinte me harcèle. “L’inaccessible étoile”, chantait Brel.
Découverte, recherche, effort de conquête : tout cela fait partie de ma construction de pêcheur. C’est ainsi que je me retrouve sur la Moselle avec Bastien, un carpiste rencontré sur le Lot l’année précédente. Nous avons 7 jours devant nous.
Après la mise à l’eau, en naviguant seul vers l’endroit où j’ai caché mon véhicule, Bastien repère une courbe concave de la rivière, où se sont accumulés des alluvions recouverts d’herbiers d’où émergent un régiment de gros dos.Quand j’embarque, il me convainc facilement de retourner dare-dare sur ce spot.
Les quelques kilomètres qui nous en séparent me dévoilent la rivière. Je suis agréablement surpris par son charme et par sa grandeur.Je découvrirai plus tard ses bras morts, tranquilles et sauvages, contrastant avec d’autres secteurs industrialisés ou urbains, plus bruyants, mais tout aussi pavés de carpes.
Il faut croire que la Moselle nous attendait. Elle nous offre immédiatement quelques trésors de son coffre-fort : une nuit blanche.Ancrés à l’écart du chenal de navigation, nous effectuons les repérages usuels à l’échosondeur. Les lignes sont vite placées sur les postes flairés par nos nez halieutiques expérimentés.
Quelques lignes dans les herbiers où Bastien a observé des carpes, d’autres qui traversent complètement la rivière, plaquées par des back-leads et posées sous les frondaisons de bordure, les dernières en proue et poupe dans le lit principal.
Peu après, le bal commence : des courbures à foison sur toutes les lignes. La plus petite pèsera 14 kg, la plus grosse 18,2 kg. Communes et miroirs mêlées pour un festin pantagruélique.
L’aventure sur ce spot se conclut par des séances photo matinales, les yeux rougis, le crâne douloureux, mais le cœur plein. Merci, Moselle, pour ce merveilleux cadeau de bienvenue !
13 août
Le choix du deuxième poste ne souffre aucune hésitation. Plus en aval, la Moselle s’élargit fortement, laissant en son centre un haut-fond recouvert d’herbiers. Les pousseurs s’engagent dans le chenal en rive droite, délimité par des bouées. Nous stationnons côté gauche, juste après ces bouées.
Nous pêchons l’herbier et risquons une ligne à 200 m, à l’entrée d’une petite baie, plaquée par deux back-leads.Une magnifique fully piquée dans l’herbier s’invite à bord. La nuit, elle, sera enfin reposante. On n’en demandait pas plus, tant la nuit précédente nous avait lessivés.
Au petit matin noyé de brume, la canne “oubliée”, celle placée à l’entrée de la baie, se courbe à son maximum. Le combat s’achève sur le zodiac, nos yeux rivés sur une 20 kg tout rond.J’adore la poignée de main qui suit : elle scelle la merveilleuse complicité qui unit les deux pêcheurs.
Les photos, prises dans l’eau encore bien chaude d’août, ont une saveur exquise. Ce contact sensuel avec la rivière et le poisson… On devient carpe.

16 août
Après deux jours de pêche en Moselle navigable, nous abordons un bras de Moselle sauvage. L’environnement change radicalement : plus calme, plus intime, plus verdoyant. La rivière est beaucoup plus étroite et le courant nettement plus soutenu, ce qui complique un peu la tenue des lignes.
Nous y pêchons depuis deux jours. Peu de courbures sur chaque poste, et des poissons plutôt modestes.Faut-il privilégier la partie navigable pour prendre du gros babar ? Je n’en sais rien.
Bastien entretient des contacts sur Face de Bouc avec des “amis” du coin. Malgré mes avertissements, il n’aura pas fallu longtemps pour que les conversations dégénèrent en cloaque de vulgarité et de violence.Les “amis” se transforment en quelques clics en ennemis, et sa voiture devient la cible de menaces de mise en pièces.
Plus haut, j’ai parlé du “raccrapotage” du monde carpiste. Euphémisme : j’aurais dû parler de débilité profonde alimentée par une jalousie maladive.

19 août
C’est sur la partie navigable que nous clôturons la session, avec quelques poissons chatouillant le peson entre 13 et 17 kg.
Bastien est un porte-bonheur. L’année précédente, c’était carton sur le Lot, avec une 23,2 kg en trophée. Cette année, sur la Moselle, un carnet bien rempli, avec une 20 en point d’orgue.Partant pour une session en 2024, Bastien ?
En attendant, je pense déjà à la prochaine. Elle se fera avec Erwin, un ami exceptionnel qui m’accompagne lui aussi une fois par an sur Furtif. Informé de mes bons résultats sur la Moselle, il trépigne d’envie de venir. Pourquoi pas ?Je suis loin d’avoir découvert tous les secrets de cette rivière.

1er septembre
Furtif est ancré une quinzaine de kilomètres plus en aval que lors de la session précédente, à Liverdun. Un secteur offrant Moselle canalisée, bras sauvages non navigués, canal et petites ballastières. Erwin est aux anges.
Sa profession et sa vie familiale le brident dans sa passion. Alors, quand il parvient à s’extraire de ses contraintes pour s’isoler sur Furtif, il frémit de joie.J’aurais voulu combler totalement ce bonheur en partageant avec lui un carton comme celui de 10 jours plus tôt avec Bastien. Hélas, nous mangeons du capot… ou presque : une seule carpe de 14 kg à ce stade.
Mon ami ne montre aucune déception. Les silures arrachent nos cannes et emportent nos zodiacs lors de combats menés à des centaines de mètres de Furtif. Erwin adore. Je prends un immense plaisir à voir le bonheur de mon pote.

3 octobre
Dans une autre vie, quand j’étais “borderiste” (néologisme : carpiste du bord), j’ai pêché le barrage de Marcillac en Corrèze avec Éric Deboutrois. À l’époque, nous militions chacun, dans nos pays respectifs, pour la légalisation de la pêche de nuit et la protection des carpes.
Pendant la session, un pêcheur local, connaissance d’Éric, était venu nous saluer. Il nous avait parlé du barrage du Chastang, tout proche : très peu pêché en raison de ses rives inaccessibles, et hanté — selon lui — par d’énormes communes. Les yeux brillants.
Cette description mystérieuse est restée des années dans un tiroir de mon cerveau. Elle a refait surface il y a deux ans.Un cabinier ne craint pas les rives abruptes : le Chastang et ses prétendues monstrueuses communes étaient à ma portée. Je m’y suis donc ancré.
Lors de cette première sortie, aucune monstrueuse commune ne bondira sur le pont, mais je garderai un souvenir impérissable de cet environnement unique.Un royaume de silence : une des rares régions de France où le bruit de fond du trafic est absent. Il fallait que j’y retourne.
Dans mes bagages, j’ai embarqué Boniface, un ami non pêcheur qui voulait faire le point sur sa vie après une grande souffrance. Pas très sexy comme programme, mais l’amitié doit fonctionner dans les deux sens.Ce compagnonnage m’a changé des sempiternelles conversations carpistes, ce qui participe aussi à mon équilibre mental.
La pêche en barrage est déroutante. Le mouillage est parfois difficile tant les fonds sont particuliers, souvent abyssaux. Les marnages sont importants et jouent sur la tension des cordages, qu’il faut vérifier régulièrement. Google Maps est un précieux outil de repérage. Dans ses options, il est possible de visionner les différentes photos satellites prises sur plusieurs années. Il faut se concentrer sur celles où le barrage est à son niveau le plus bas : les hauts-fonds se dévoilent alors, et avec eux, les secteurs les plus facilement pêchables.

6 octobre
La pêche a un effet indéniablement thérapeutique : je le vois au moral rosissant de Boniface. Est-ce le dépaysement total, ou les cannes déroulantes que je lui colle dans les mains qui le rendent, par instants, plus heureux ? Probablement les deux.
Je suis content de cette session : les carpes fatiguent l’épuisette, et je prends plus de plaisir à voir Boniface les travailler que si je les prenais moi-même.
Nous rentrons dans trois jours. Il reste encore du temps pour ferrer la “monstrueuse” du barrage.

29 octobre
Ma dernière session en bateau de l’année se termine aujourd’hui. Quatre jours sur la Seine, pour une seule carpe. On dit que la rivière est sur “off”.
Par contre, j’ai fait le plein de pixels d’automne : les couleurs chatoyantes, elles, étaient sur “on”.J’ai assommé deux romans d’Armel Job : Tu ne jugeras point et Loin des mosquées. Lisez cet auteur belge ! C’est du piment à la pêche, une évasion supplémentaire à l’évasion de la pêche.C’est un dérivé morphinique, un chemin vers le bien-être. Et distancez-vous donc un peu de Face de Bouc, ce fabuleux vecteur de médiocrités.

12 novembre
Mes bateaux sont en hivernage. C’est triste. Mais les cannes réclament encore d’être secouées : une douceur inhabituelle règne sur la Belgique, prolongeant la saison.
J’accède de bonne grâce à leur désir. Pendant une dizaine de jours, je me rends presque quotidiennement sur la carrière proche de mon domicile. Des pêches éclairs de quelques heures, sur différents postes amorcés, où gloutonnent mes invitées.
Ma saison se termine sur des départs roulants sur mes Delkim : un retour au passé, celui de la pêche du bord. Les premières gelées, puis deux capots successifs, m’aiguillent vers une autre mission : mettre de la paille dans le nid familial. Il en avait bien besoin.


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